Pérou | Choquequirao : héritage inca qui renaît entre nuages et montagnes

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Isolée et distante entre les sommets de la chaîne de montagnes de Vilcabamba, la citadelle de Choquequirao continue de retrouver la splendeur architecturale et historique qui, au cours des derniers siècles, s’est assoupie sous ses murs de pierre et la forêt sauvage de la jungle.

Le soleil couvre très tôt la vallée d’Apurímac. Le Salkantay enneigé se distingue avec ses deux têtes bleues devant San Pedro de Cachora. C’est de cette petite ville de la région d’Apurímac que nous partirons pour le sommet du Choquequirao, dans la province de La Convención (Région de Cusco), à environ 40 kilomètres le long d’une piste cavalière.

San Pedro de Cachora est une ville paisible (tu peux choisir aussi si tu préfères  « agréable » ou « tranquille » ).Elle ne ressemble pas à l’ancre cosmopolite qu’est devenue Aguas Calientes (étape obligatoire pour monter à la citadelle du Machu Picchu). Ses habitants sont plutôt locaux et il n’y a pas d’hôtels cinq étoiles. Vous pouvez toujours acheter de la chicha de jora (boisson fermentée du maïs apparentée à la bière) ou des produits bio au marché de la ville.

Le ciel est d’un bleu intense avec des nuages qui semblent avoir été peints à l’huile. Après avoir parcouru onze kilomètres – ce que nous avons fait en voiture grâce à la gentillesse d’un local – nous arrivons à l’allée cavalière qui débute sur les hauteurs du belvédère de Capuliyoc, à 2 800 mètres d’altitude. Nos sacs à dos commencent leur propre voyage sur des mules. Il est temps de préparer vos jambes pour une descente de cinq heures jusqu’à atteindre le niveau de la rivière Apurímac (1 400 mètres d’altitude), au kilomètre 21.

En pénétrant dans l’un des canyons les plus profonds des Amériques, nous observons comment la végétation andine cède la place à l’exubérance de l’Amazonie. La somptuosité des massifs montagneux fait oublier la distance et la fatigue.

Quelles pensées pouvaient avoir les anciens Péruviens alors qu’ils marchaient vers la citadelle d’abord pour la construire, puis pour l’habiter ? A quelle stratégie réponds sa construction : militaire ou religieuse ? Pourquoi ériger une construction très imposante qui semble toucher les nuages au lever du soleil et qui semble être constituée d’or quand le soleil tombe ?  , combien de mystères ces pierres cachent-elles ?

Berceau Doré

Le choquequirao est issu du mélange de deux langues ancestrales telles que l’aymara « chuqui » (or) et le quechua « k’iraw » (berceau). On raconte que la citadelle servait de trait d’union pour faciliter les échanges entre Cusco, la capitale de l’empire inca, et les communautés de la jungle, qu’elle n’a jamais pu annexer.

Entre le belvédère de Capuliyoc et la plage au bord de la rivière vers laquelle nous descendrons se trouve Chiquisqa, un hameau où vous pourrez acheter des fruits, des biscuits ou des chocolats, prendre un bain ou vous reposer dans la zone de camping.

Les genoux sont fatigués mais il faut continuer. La résistance disparait rapidement et quelques bâtons de roseau viennent à notre aide en l’absence des bâtons de marche oubliés. L’objectif est de se reposer sur les rives de l’Apurímac.

Dernier lieu de repos

La lune apparaît dans le ciel andin. Cette même lune qui a été complice des mouvements secrets du dernier Inca, dans la seconde moitié du XVe siècle. C’est alors que je me souviens que Manco Inca et ses fils ont résisté à l’invasion espagnole pendant 36 ans dans cette citadelle construite par Pachacútec – et dans d’autres habitations de la vallée de Vilcabamba – jusqu’à l’exécution de Túpac Amaru I, en 1572. Combien de nuits blanches ces derniers Incas rebelles auraient-ils passés au milieu de ces montagnes ?

Sous ce ciel noir où l’on pourrait presque toucher les étoiles , nous avons décidé de prolonger notre marche , de parcourir encore quelques kilomètres sous la pénombre pour nous sauver du soleil le lendemain. Traverser la rivière, la nuit est une autre aventure. Un oroya (sorte de panier géant fait de bois et de cordes) nous attend pour passer deux par deux vers la rive droite de l’Apurímac, et vers la chaude région de Cusco. Après avoir traversé la rivière, il est temps de grimper à 1 400 mètres d’altitude à la ferme Santa Rosa, 600 mètres plus haut.

Rolan, le guide, nous encourage à ne pas baisser les bras. De nom de famille Cobarrubias, il révèle être descendant direct des premiers habitants qui ont redécouvert la citadelle au début des années 1900. Ses grands-parents auraient guidé Hiram Bingham, selon les légendes familiales, jusqu’au sommet de Choquequirao, où seule une partie des constructions les plus importantes du complexe pouvait être aperçue, puisqu’elle était recouverte d’une végétation sauvage. Cela a conduit l’Américain à décider – quelques semaines avant d’arriver au Machu Picchu – que Choquequirao n’était pas la ville perdue qu’il cherchait.

Gemme Caché

Jusqu’à la ferme Santa Rosa, il faut grimper pendant trois heures. Un descendant des Cobarrubias nous accueille et nous héberge pour le reste de la nuit. Il faut partir à l’aube pour arriver avant  le soleil. « Quand le soleil tape fort, même les muletiers ne veulent pas monter », nous avait prévenu une habitante du coin.

De Santa Rosa au parc national de Choquequirao, vous pouvez encore vous reposer dans la ferme Marampata, à quelques kilomètres de la citadelle. Mais notre objectif est de camper dans la zone de camping la plus proche du complexe, à environ deux kilomètres avant la place centrale.

L’après-midi est dorée et quelques mètres nous séparent de l’espace terrasse du complexe archéologique. Quelques minutes plus tard, la perfection commence à apparaître, vous pouvez voir des plates-formes sur les pentes abruptes qui surplombent la rivière.

Les conditions atmosphériques en ce lieu sont privilégiées et nos ancêtres le savaient. Le climat est tempéré mais les vents de l’après-midi sont assez froids. Ces caractéristiques ont été et continuent d’être exploitées par les agriculteurs andins.

En fin d’après-midi et lorsque le soleil menace de se cacher derrière les montagnes et les nuages denses des Andes, une construction en pierre ensoleillée nous accueille enfin depuis un sommet. Les derniers rayons éclairent juste le sommet où se trouve Choquequirao.

La place centrale de la citadelle s’étale d’un vert éclatant sous nos yeux. Une étrange émotion nous envahit. En parcourant la citadelle, nous savons que la longue marche a été amplement récompensée. Il n’y a de place que pour l’admiration.

Son Architecture

Si quelque chose caractérise l’architecture inca c’est sa grande technologie, sa simplicité dans les formes et surtout son harmonie avec la nature. À Choquequirao, il y a neuf zones de pierres construites comme de petits villages autour d’une grande place centrale.

Certaines de ces zones ont déjà été identifiées : la place supérieure (Hanan), les entrepôts (Qolqa), la place principale (Huaqaypata), la place inférieure (Hurin), le système  de cultures en terrasses situées très près de la place principale (Chaqra), la plate-forme cérémonielle (Ushno) et la demeure des prêtres dans la partie inférieure du complexe.

Les bâtiments les plus impressionnants sont à deux étages. Deux se trouvent sur la place principale, l’un d’eux aurait été la demeure de Manco Inca, et l’ autre du Curaca (fonctionnaire de l’empire Inca) et de ses apprentis. Ils ne sont pas couverts, ce qui permet de mieux apprécier la similitude architecturale avec les constructions du Machu Picchu. Un canal d’irrigation nous rappelle la grandeur des ingénieurs incas.

Mais ce n’est pas tout. Dans la soi-disant « zone des lamas », il y a trente enregistrements de pierres blanches ayant la forme de ces animaux placés uniformément sur les 15 plates-formes qui formaient une sorte de porte d’entrée vers la Vallée Sacrée, selon les archéologues.

Plus grand que Machu Pichu

On ne voit toujours pas l’immensité des 1 810 hectares de la citadelle, seuls 30% ont été sauvés. Cependant, on nous dit que Choquequirao serait trois fois plus grand que Machu Picchu. On a du mal à imaginer l’intérêt qu’il suscitera lorsqu’il sera accessible non seulement aux marcheurs têtus, mais aussi aux voyageurs pressés qui préfèrent remplacer les deux jours de marche par un trajet de seulement 15 minutes en téléphérique qui serait installé dans le quartier de Huanipaca (juste à côté du front de Choquequirao).

Le guide nous apprend que de nombreuses personnes choisissent de randonner à partir de ce quartier car le parcours est évidemment plus court, cependant, plusieurs habitants s’accordent à dire que c’est aussi le parcours le plus dangereux, car il est non seulement plus escarpé mais manque également de points d’eau.

Certains voyageurs que nous avons rencontrés dans les bâtiments en pierre nous disent qu’ils feront le chemin du trekking jusqu’au Machu Picchu, un tronçon de 6 jours qui, malgré ses difficultés, a l’énorme chance  de traverser les sentiers incas et les magnifiques sommets enneigés de Yamana.

Sur la place centrale tapissée de verdure, un touriste français écrit peut-être ses impressions ou une réflexion personnelle dans un carnet. D’autres prennent le chemin du retour au milieu de la paix que seul un sommet silencieux et isolé du monde peut offrir. Enivrés par tant de beauté scénique et de richesse architecturale, nous devons nous aussi retourner au camp. Demain, nous pourrons revenir et apprécier ces murs à la lumière du matin.Puis nous retournerons à Cachora par les chemins en zigzag, devant d’imposantes montagnes enneigées et des gouffres sans fin, oubliant la fatigue de la marche dans chaque hameau et laissant derrière nous les fougères tropicales pour retourner vers l’ichu andin de l’autre côté de la Apurímac.

Si vous êtes intéressé pour partir au Pérou à la rencontre de Choquequirao, n’hésitez pas à contacter notre collaboratrice, Claudia Ugarte sur Instagram :@claudiaugartev / @fotoviajera.pe

Et si vous avez un bon niveau d’espagnol, vous pouvez également lire plus des articles de Claudia et sur autres villes péruviennes moins connus dans : www.lafotoviajera.com

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