Pulpo, un restaurant péruvien qui rassemble à tous

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C’est à la fin des années 80, qu’une famille péruvienne débarque en France à la recherche d’un meilleur avenir. C’est un jeune couple avec ses trois filles qui décide de se faire une nouvelle vie. Ana, mère et femme habitue dès le plus jeune âge à une vie où la meilleure façon de se faire remarquer est de travailler, prend la décision de se lancer dans la création d’un des premiers restaurants de gastronomie péruvienne à Paris. Le rêve de la famille est une réalité depuis sa création, il y a 25 ans. « El Pulpo » ouvre ses portes tous les jours à tous sans exception.

Au Pérou, Ana a été couturière et la seule chose qu’elle connaissait du travail dans une cuisine était la préparation des plats faits maison. Cependant, l’idée de créer un restaurant péruvien demande la maîtrise de plusieurs plats traditionnels de la gastronomie péruvienne, comme par exemple Le « Ceviche », le plat national du Pérou à base de poisson avec sa marinade de citron vert, aïl, piment rouge et coriandre.

Ana voulait réussir dans cette nouvelle aventure donc elle décida de demander l’aide d’une autre femme péruvienne qui connaissait bien la façon de cuisiner pour un restaurant. « Cette femme m’aidait à des expériences culinaires, à savoir comme utiliser les condiments pour que chacun des plats ait le goût du Pérou. Ce furent des journées fatigantes, mais j’étais décidée à avoir mon propre businness », se souvient- elle.

À cette époque, l’idée de monter un restaurant avec de plats du terroir tombait bien, car Il n’existait pas un seul migrant qui, dans son pays d’accueil ne cherche à retourner pour un instant à la maison, à travers le plaisir de manger.   

Le coin péruvien à Montmartre

Le destin joue en faveur d’Ana quand se présente la possibilité de compter sur un petit emplacement au nord de la Butte Montmartre. C’est en 1998 que le restaurant ouvre ses portes et dès le premier jour attire l’attention des voisins du quartier et des péruviens aussi. « Je me souviens que les gens faisaient la file à l’extérieur du restaurant. C’étaient des jours fous ! Tellement que mes filles ont dû travailler avec moi pour pouvoir servir les clients. On déboullait sans arrêt dans toute la salle ».

Et c’est justement pour cette énergie d’Ana et de sa famille que leurs propres clients, ont donné le nom de « Pulpo » au restaurant. « Un jour un client m’a dit : Madame, vous déboullez de partout et vous faites tout, vous ressemblez à un poulpe », commente Ana. Depuis ce jour-là, le nom de « El Pulpo » commença à faire de bruit par tout.

Les plats comme le « Ceviche », le « Lomo saltado », la « papa a la huancaina », sont les plus demandés à la carte. Cependant, Ana avait l’idée claire qu’elle voulait que son restaurant soit plus reconnu comme un lien de nourriture familiale que comme un espace « de mode ».

« Je voulais que les gens se sentent comme dans un restaurant à Lima ou dans n’importe quelle province du Pérou ».

Pour offrir cet effet, les menus sont pensés selon la même recette que des menus typiques de la nourriture populaire péruvienne. Au Pulpo, on ne cherche pas de la haute cuisine, on cherche à expérimenter la cuisine péruvienne faite maison. Et pour compléter cette expérience, la décoration du lieu est minimaliste, pas du tout prétentieuse ou chargée.

Par exemple, sur les murs se trouvent quelques touches d’artisanat et de détails qui évoquent, bien sûr, le Machu Picchu, les nappes donnent une touche de couleur. Et même, le panneau avec le nom du restaurant passe presque inaperçu de l’extérieur. Peut-être êtes-vous passé à côté du Pulpo en vous demandant : « C’est un restaurant ou une épicerie d’Amérique Latine ? ».

Ceux qui ont franchi la porte, soit par curiosité ou pour se remémorer un souvenir gustatif, sont repartis surpris et heureux. « Plusieurs clients français viennent au restaurant avant de partir au Pérou, pour se donner une idée d’à quoi ressemble notre cuisine. D’autres qui ont déjà visité le pays viennent pour retrouver ce qu’ils ont aimé manger ainsi que retrouver l’ambiance », dit Ana avec un sentiment de fierté.

« On ne refuse l’entrée à personne »

Depuis ces premiers jours, se sont passés 25 ans et El Pulpo continue à ouvrir ses portes. Mais quelle est la recette pour avoir l’acceptation du public après tant d’années ? Janet, la fille aînée d’Ana répond que le secret est la façon de cuisiner et l’affection de sa mère pour ses clients. « Ma mère est une personne très généreuse qui cherche toujours à aider les gens. En plus, elle écoute ses clients avec attention et quelquefois, elle se fait leur amie et leur donne son soutien et des conseils », partage Janet pendant qu’elle regarde sa mère avec les yeux chargés d’admiration.

Le cœur d’Ana est ouvert à tous, tel est le cas pour un groupe de jeunes transsexuelles latino-américaines qui sont ses fidèles clientes. Au début, il a été difficile pour quelques clients de partager l’espace avec « les filles » d’Ana, comme elle aime les appeler.  « Il y avait des clients qui me demandaient de les faire partir sans quoi, ils ne reviendraient plus. J’ai opté pour continuer avec mes filles. Je connais leur histoire et la complication qui est de survivre dans un monde qui les discrimine ».

Janet ajoute qu’elles sont très reconnaissantes envers sa mère, car le restaurant ne leur a pas fermé les portes et elles sont traitées avec respect. « Pendant le Covid-19 quand les restaurants avaient la permission de faire la vente à emporter, ce sont elles qui nous ont aidé à continuer et à rester debout. Quelquefois, elles peuvent être un peu bruyantes dans la salle, mais ma mère les encadre et elles l’écoutent immédiatement. C’est une relation de respect mutuel ».

Une des nombreuses fois où j’ai été au Pulpo comme client, j’ai été témoin de ce respect. Un jour une des filles assises à la table à côté me disait :

« Je viens ici parce que la cuisine est très bonne, c’est comme si je mangeais chez moi. Ici on ne se sent pas jugé, nous sommes traitées comme les autres clients. Je considère Ana, comme ma mère ». Au Pérou, les mères expriment leur amour à travers la cuisine, plus qu’en mots. À la maison, toujours, il y avait un plat chaud sur la table, peu importait l’heure.

Les clients du Pulpo sont très variés, vous pouvez trouver des péruviens, des français et des gens venus d’autre pays d’Amérique Latine. Je ne peux pas nier une certaine fierté quand, un client colombien ou équatorien, une fois fini son plat, s’approche d’Ana et lui dit, « Madame, c’était très bon, meilleur que chez moi ».

« Je vais continuer jusqu’ au bout »

L’envie d’Ana pour continuer le restaurant est toujours fort. A 70 ans, elle n’envisage pas de passer ses jours en dehors de la cuisine. Tout le temps de notre conversation, elle voulait souligner que leur succès n’aurait pas été possible sans un vrai travail en équipe entre sa famille et Jorge, le chef cuisinier depuis la création du Pulpo. « Jorge et moi, nous nous sommes organisés pour faire la cuisine. Il prépare les plats le midi et moi les soirs. Quand, il part en vacances, les clients demandent après lui ». Jorge est une personne très discrète, il ne parle pas beaucoup, mais si on lui demande comment préparer un plat, il dévoile un grand sourire et déploie toute sa connaissance. Les deux en salle sont l’âme du Pulpo.

Les plats du restaurant sont préparés sur le moment avec des produits frais. Pour cela, Ana est en charge d’aller en début de semaine acheter tous les ingrédients nécessaires. Elle est connue du boucher et du poissonnier du quartier, et des gens qui travaillent dans les grandes surfaces. « Ma mère toute seule se promène dans tout Paris avec un chariot et des sacs de plus de 10 kilos. Elle ne veut pas nous attendre pour l’accompagner. Elle veut continuer à avoir son autonomie, même si je lui dis qu’à son âge, elle doit faire attention, car sa santé est le plus importante », dit la fille à sa mère.

Mais Ana, ne veut pas laisser son restaurant, « Je me sens vivante chacun des jours où je vais travailler. Si je reste à la maison, je suis triste. Je me demande où vont aller manger mes clients et mes filles. Mais je suis consciente qu’un jour je ne pourrais pas y venir, déjà j’ai quelques problèmes de santé ce qui est normal à mon âge. Je voudrais y aller jusqu’au bout ».

Janet, sa fille sent la tristesse de sa mère et quelques larmes tombent de ses yeux, car elle sait, qu’une fois sa mère partie, le restaurant devra fermer ses portes. « Chacun de nous a un métier et une famille. Nous n’aurions pas le temps nécessaire pour maintenir le restaurant ». Pour l’instant Ana veut vivre jour après jour et veut que chaque client sorte du restaurant avec le plaisir d’avoir bien mangé.

En Île-de-France, il y a 48 restaurants péruviens en 2023, selon le Consulat du Pérou à Paris. Dans cette liste, j’en ai visité quelques-uns qui ont attiré mon attention pour leur ambiance, pour la présentation des plats, pour la fusion des cuisines. En fin, il y a beaucoup de choix à tester selon notre intérêt d’approche de la cuisine péruvienne.

En partant de mon expérience, si vous cherchez à tester la cuisine populaire péruvienne à prix accessible Le Pulpo est la bonne adresse. Les plats à la carte sont servis en portion généreuse, ainsi que les menus, qui sont totalement identiques à ceux qui se mangent dans les restaurants populaires à Lima et en province. Vous pouvez réserver la salle d’une capacité de 25 couverts pour des anniversaires, également.  Je vous conseille de commencer le voyage sur la carte du Pulpo avec le plat « Lomo Saltado ».

Ana sera ravie de vous accueillir.

L’adresse :

El Pulpo, 85 Rue Lamarck, 75018 Paris

Horaires : ouvert de lundi à dimanche. De 12h à 17h / 19h à 21h45

                   Dimanche de 12h à 16 :30

Site internet :

https://el-pulpo-peruvian-restaurant.business.site

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